Bonjour, ou bonsoir, je ne sais pas, à toutes et à tous. Aujourd’hui, je n’ai plus internet. Je dis aujourd’hui, mais ça dure depuis plus de 24h. Je vous écris donc ces quelques mots sans savoir si je vais pouvoir vous les faire parvenir, et si je peux, à quelle heure vous pourrez les lire. Autant vous dire que je ne suis donc que très moyennement motivé, mais si par un heureux miracle la connexion était rétablie et que je n’avais pas rédigé un mot, certains et certaines m’accuseraient d’avoir profité de la panne pour ne rien foutre. Ce qui est assez mon genre, je dois le reconnaître. C’est d’ailleurs étrange, mais du fait de ne pas écrire directement sur l’interface du blog je n’ai pas l’impression de m’adresser réellement à vous. J’ai la sensation de faire semblant. Les mots ne viennent pas comme d’habitude. Je me force. D’habitude vous n’êtes pas là non plus, c’est vrai, mais j’ai moins de mal à vous imaginer.
Hein ? Comment se fait-il qu’il n’ait pas internet, vous demandez ? En vérité je ne sais pas si vous le demandez, puisque comme je vous le disais j’écris ce document sur LibreOffice et que le lien magique qui me permet d’habitude de savoir exactement ce que vous vous dites au moment ou vous vous le dites est rompu, mais il faut bien que je fasse avancer mon histoire, alors je fais semblant. Comment ça, pas d’internet, donc ? Parce que nous partageons une connexion entre voisines et voisins du même étage. Sommes-nous à ce point fauchés ? Non, mais nous vivons dans de faux appartements. Ah, je sens que j’ai piqué votre curiosité. S’agit-il d’appartements en pain d’épice comme dans le conte Hansel et Gretel ? Ou, un peu comme dans Hook, pensons-nous très fort des portes, des murs, et des salles de bains pour que le terrain vague se transforme en habitation standard par le pouvoir de l’imagination ? Non. Ce n’est pas ça.
Nous vivons dans des appartements qui n’en étaient qu’un seul à la base. Un seul d’environ cent mètres carrés, que les propriétaires ont partagé en quatre studios d’une vingtaine de mètres carrés tout en n’en déclarant qu’un seul. Je sens qu’on va s’amuser pour régler la taxe d’habitation. Il paraît que ça se fait de plus en plus, de partager les appartements en minuscules clapiers. C’est qu’il doit y avoir avantage. Pour le propriétaire, s’entend. Enfin, le problème le plus important pour un blogueur comme moi qui a déjà assez de mal à se tenir à la régularité dans ses publications vient des prises téléphoniques et fibre. Dans trois des quatre appartements, dont le mien, elles sont là, bien visibles, neuves à vrai dire, et pour cause : elles n’ont jamais été connectées à quoi que ce soit. D’un blanc plastique immaculé je vous dis. Les câbles n’ont pas été tirés, personne ne sait ou ne veut savoir exactement où se situe quoi. Ni ex-France Télécom, ni le fournisseur d’accès fibre de l’immeuble, ni le propriétaire des clapiers, ni le gérant qui n’est pas une agence et qu’on se demande bien ce qu’il est, ni le mec qui s’occupe des réparations dans tous les appartements que gère le gérant et qui est le seul de tous ces interlocuteurs auquel on ne s’adresse qu’en l’appelant par son prénom. L’origine africaine de son prénom et le fait qu’il soit homme toutes mains, factotum dirait l’autre, me fait penser que son statut et ses origines justifient du point de vue du gérant et des propriétaires le fait qu’ils n’aient jamais senti le besoin de nous le présenter par son nom de famille, et donc encore moins en le faisant précéder de Monsieur, contrairement à eux-mêmes. Je ne vous fais pas la liste exacte de tous les éléments qui me font appeler ces lieux de faux appartements, croyez-moi simplement si je vous dis que ça ne s’arrête pas là. Mais revenons aux prises qui ne sont là que pour faire joli (et qu’elles sont jolies !) : la seule personne à avoir réussi il y a quelques années, après des mois de galère, à obtenir de toutes les personnes concernées qu’elles prennent le temps de trouver un moyen de faire raccorder son appartement, partage la connexion de la box ainsi que son abonnement, avec les trois autres appartements. Et c’est bien sympa de sa part.
Malheureusement, il arrive que la box plante. Ce qui est le cas actuellement. De plus, la voisine abritant cette dernière dans son faux appartement s’étant sans doute absentée, comme souvent, pour le week-end et ne nous ayant pas laissé moyen de la contacter, nous l’avons dans l’os. Avec mon amie nous avons bien essayé de créer un hotspot à partir de la 3G de son téléphone, mais celui-ci étant trop mauvais nous n’avons pas réussi à charger une seule page internet depuis le milieu de l’après-midi. Et mon téléphone à moi ? Ça fait plusieurs années que j’ai opté pour un abonnement sans internet. Ne me jugez pas.
Voilà donc où nous en sommes : il est possible que vous ne lisiez jamais ce billet, ce qui, convenons-en, ne produirait sans doute pas un grand manque chez vous, mais si par hasard j’arrive tout de même à accéder au blog avant minuit, il n’est pour autant pas garanti que ce me soit également possible samedi et dimanche, ou même lundi. Dans ce cas-là, ne vous inquiétez pas, vous savez maintenant quelle est la raison de cette absence, et surtout ne pensez pas que tout ça est dû au fait que je suis une grosse feignasse. C’est peut-être vrai, mais vous me vexeriez énormément.
Allez, on se revoit au plus tôt.