Aujourd’hui, j’ai été contacté par la police. Je vous rassure toute de suite, ce n’est absolument pas vrai, mais ayant passé ma journée à dormir, manger, étendre le linge ou mixer de la courge, il faut bien que j’invente quelque chose. Veuillez donc me faire l’obligeance d’imaginer que tout ce qui va suivre est vrai. Aujourd’hui, je disais donc, j’ai été contacté par la police. Alors que je mixais bien tranquillement une courge, sifflotant l’air connu ∼Bad boys, bad boys, watcha gonna do ? Whatcha gonna do when they come for you∼, mon téléphone sonna soudainement. Oui, alors là j’essaie de mêler le faux et le vrai pour donner plus de crédibilité à mon récit. Je ne sais pas si c’est très réussi, vous me direz. Je sifflotais, donc, et mon téléphone sonna soudainement. C’était en effet cette sorte de coups de téléphone qui sont soudains. Il y a des coups de téléphone qui arrivent plutôt progressivement, voire même en vous prévenant un peu à l’avance, mais là non. Je lâchai donc, surpris, ma courge et mon mixeur à bras pour répondre, non sans m’être bien essuyé les doigts auparavant. Je précise qu’il s’agit d’un mixeur à bras car les mixeurs qui ressemblent à des sortes de carafes avec une hélice au fond ne méritent franchement pas qu’on les appelle mixeurs. Pourquoi ? Parce que la plupart du temps ils ne mixent rien de ce qui se trouve sous l’hélice, mixent à peu près bien ce qui se trouve au niveau de l’hélice sur une tranche de, disons, un centimètre et demi, et ne mixent toujours rien de ce qui se trouve plus haut que l’hélice. Enfin, sauf si le mélange est assez liquide, évidemment. Ça marcherait donc sans doute assez bien pour la soupe de courge, mais pour du houmous ou de la purée de cacahuète, excusez-moi, mais c’est un non ferme et définitif. Avec un mixeur à bras, a contrario, on mixe tout. Vous allez me dire que pourtant j’ai explosé mon mixeur à bras quasiment neuf il y a quelques jours à peine en réalisant une purée de cacahuètes —et là nous sortons un peu de la fiction mais il y a des choses qu’on ne peut pas s’interdire de dire sous prétexte de divertir le lecteur ou la lectrice, non vraiment, c’est ma conviction intime, il y a des questions trop importantes pour être évitées et sur lesquelles on se doit d’être transparent vis-à-vis de son lectorat, et je crois, vous me contredirez si vous pensez que je me trompe, qu’il s’agit là d’une de ces questions—, et vous aurez raison. En effet, mon mixeur à bras quasiment neuf à explosé de l’intérieur il y a quelques jours dans une grande odeur de plastique brûlé, me laissant face à un demi kilo de poudre de cacahuète à peine collante et parsemée de gros morceaux. Seulement, c’était peut-être uniquement un problème sur cette série de mixeurs, et je continue de croire qu’il vaut mieux, dans tous les cas, utiliser un mixeur à bras qu’un mixeur en forme de carafe avec une hélice au fond. Que ce soit pour une soupe de courge, pour un houmous ou pour une purée de cacahuètes. « Allo ? fis-je. – Oui allo, c’est la police. – C’est pourquoi ? – Eh ben euh, voilà, on est bien embêtés avec mon collègue, mais le chef nous a demandé de vous demander d’agir un peu plus en adéquation avec votre apparence. – C’est-à-dire ? – Eh ben euh, vous avez les cheveux longs, vous êtes barbu ou au mieux mal rasé, vous vous habillés – « habillez » – Oui, habillez, pardon, en loques et vous passez votre temps à lire des articles de journalistes gauchistes soixante-huitards aux terrasses des cafés en fumant des cigarettes à rouler de la marque Pueblo. – Vous êtes bien renseignés, mais quel est le problème ? – Eh ben euh, c’est que, quand vous passez à côté des manifs, nous, on ne sait plus si on doit ou non vous taper dessus. – Mais, je ne vais quand même pas mettre un gilet jaune pour vous faire plaisir ? – Peut-être pas un gilet jaune, d’autant que la plupart sont des travailleurs ou de droite et que vous vous ressembleriez plutôt à un clochard, mais une petite banderole « étudiants en colère » au moins… – Bon, écoutez, ça va bien maintenant. Déjà que je reste au RSA pour coller à l’image que mes parents se font de moi ! Je ne peux rien faire de plus pour vous. Au revoir messieurs ! » Et je raccrochai. À dire tout à fait vrai, je ne sais pas pourquoi j’invente cette histoire de police, bien que (j’en suis sûr) elle ne vous ait pas laissé insensibles, car ce matin avant de me rendormir et puis de manger et de mixer la courge et d’étendre le linge, je suis également aller faire un bilan de la vue chez l’ophtalmologue. Et là, attention l’aventure ! Quelle ne fut ma surprise quand lisant mon ordonnance pour de nouveaux verres, je découvris que ma myopie s’était semble-t-il améliorée ! Le médecin ne m’ayant pas touché un seul mot durant tout l’entretien, je ne savais pas trop qu’en penser. J’ai été cependant vite déçu en lisant sur internet que ce n’était certainement pas le cas et qu’on m’avait sans doute sur-corrigé par le passé. Ou alors que c’est quelque chose de beaucoup plus grave. Non, tout bien réfléchi j’ai eu raison d’inventer cette historiette, je sens que vous vous en souviendrez longtemps. Allez à demain.
3 réflexions sur « #191 – Lyonniais #017 – Allo ? Tu vas pas me croire ! »
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L’ophtalmo a de la chance, il a trois noms au moins. Ce dernier, plus « ophtalmologue » (terminaison courante en médecine, mais peu élégante en son cas), et, dieu merci, « ophtalmologiste », ce qui le rapproche quelque peu de la belle Mathématique et de sa sœur la Philosophie.
Merci très cher confrère blogueur pour ce point assez complet sur les différents noms des médecins de l’œil. Je crois cependant que par soucis d’exhaustivité nous nous devons d’inclure à cette belle liste une quatrième dénomination assez courue bien qu’erronée : « opticien », comme on peut l’entendre dans la phrase classique suivante : « J’crois qu’j’y vois pus très bien, faudrait qu’je vais à l’opticien pour qu’y m’dise si faut qu’j’me fait faire de nouvelles lunettes à la boutique de lunettes. »
Pour ajouter l’insulte à l’injure, quelque toilettage s’est déjà installé à côté d’un opticien (un vrai) avec le nom suivant : « O p’tit chien ».
Les coiffeurs du quartier ont perdu toute crédibilité.