#273 – Le Serpent extraordinaire de Montpellier

Vous savez, moi et les infos, c’est l’amour-haine, alors j’ai consenti à bien vouloir m’informer de ce qui ce racontait dans la presse au mois de juillet, mais à l’unique condition que ce soit un mois de juillet éloigné de plus de trois cents ans de mon présent. Eh ben j’ai pas été déçu.

Lu dans le Mercure Galant de Juillet 1678, pp. 153–156 :


Je ne puis m’éloigner de Montpellier ſans vous apprendre une choſe auſſi ſinguliere que ſurprenante, qu’on a veuë à trois lieües de là, depuis quelques jours. Un Apoticaire herboriſant dans la Campagne, mit le pied ſur des brouſſailles qui cachoient un Serpent des plus monſtrueux. Ce Serpent ſe ſentant bleſſé, ſe dreſſa tout furieux, fit pluſieurs plis autour du Corps de l’Apoticaire, le mit par terre, & le tint tellement preſſé, que c’eſtoit fait de luy, ſi des Bergers qui n’en eſtoient pas fort loin, ne fuſſent accourus à ſes cris. Ils tuerent le Serpent, & délivrerent ce malheureux qui en avoit reçeu pluſieurs bleſſures. Il eſtoit extraordinairement enflé du venin qui s’eſtoit gliſſé par toutes les parties de ſon Corps ; mais deux ou trois priſes du Thériaque qui ſe fait à l’Université de Montpellier, le remirent dans ſon premier état. On fendit le Serpent. Il avoit trois œufs dans ſon ventre, & ce qui vous ſurprendra, c’est que ſur l’un de ces œufs on a trouvé ſix mots monoſyllabes, rangez en colomne, parfaitement diſtinguez les uns des autres, & ſi bien écrits, qu’un Peintre auroit eu peine à les mieux marquer. Ces mots ſont, ou, pa, re, ma, ne, pa. Vous ne doutez pas qu’on ne travaille à l’envy à les expliquer. Cet œuf a eſté donné à Mr le Cardinal de Bonzi, qui le conſerve comme une choſe fort curieuſe.


Comme quoi y a pas qu’à Marseille.


Police d’écriture utilisée pour la reproduction du texte ancien : IM FELL DW Pica. The Fell Types are digitally reproduced by Igino Marini. www.iginomarini.com

2 réflexions sur « #273 – Le Serpent extraordinaire de Montpellier »

  1. Ouh la, ça commence comme un placement de produit, ça continue avec une fake news (je me permets de le supposer) et ça termine comme un jeu verbal façon pré-mots croisés. Vraiment une bafouille de journaleux commercial !

    1. Et pourtant je pense qu’il écrivait plus pour le lectorat parisien. Mais peut-être qu’en cas de piqûre de vipère, et moyennant quelques écus, l’université de Montpellier vous envoyait un thériaque par transporteur, livraison sous 70 jours.

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