Hier, je me suis mis en tête de vous causer, de temps à autres, de compositeurs et compositrices Lyonniais·es. Pas de contemporains, quoi que ça pourrait venir (c’est qu’il faut bien le remplir ce blog et qu’à la longue je risque d’être à sec niveau sujets), mais des vieux et des vieilles ! Et c’est comme ça que je suis tombé sur Gaultier le Vieux. Enfin, Gaultier de Lyon. Enfin, Ennemond Gaultier. Ouais… On y reviendra.
Donc, au hasard de mes recherches, je trouve deux partitions pour clavecin issues du Manuscrit Bauyn. Un vieux recueil de pièces pour… Pour…? Clavecin. Très bien. Alors, les titres… Sarabande de Mr Gaultier et Canaries de Mr Gaultier. Okay. Apparemment, c’est pas ses morceaux les plus connus, d’autres de ses compositions portent le même nom, mais a priori ce ne sont pas les mêmes. Voyons voir ce que ça donne. Je lance mes logiciels de musique et je commence à y recopier note par note les partitions. Entre temps, je suis allé faire un petit tour sur Wikipédia où j’apprends que ce brave Ennemond n’était pas du tout claveciniste, mais luthiste. Bon, mais après tout, on peut très bien jouer d’un instrument principal tout en composant pour n’importe quel autre instrument.
Une fois la sarabande notée dans mon logiciel, j’y colle donc un beau son de clavecin et je lance le playback. Hum. C’est pas beau. Ça ne sonne pas clavecin du tout. Mettons-y un son de luth, et quelques percussions vite faites. Et maintenant ?
Ça passe un peu mieux. Alors, oui, vous allez me dire que normalement, une sarabande, c’est plus lent que ça. Hein que vous allez me le dire ? Allez-y, dites le moi. Ah ! Et bien vous vous plantez. Vous n’aviez qu’à mieux vous documenter, ou, comme moi, simplement lire en vitesse quelques infos sur Wikipédia. La sarabande, donc, est à la base une danse rapide qui nous vient d’Espagne ou d’Amérique du Sud, on sait pas bien. On ralentira son tempo au cours du temps, mais on estime qu’à son introduction en France, entre les années 1620 et 1630, elle est encore rapide et ne deviendra la sarabande lente, on pourrait dire baroque, qu’à partir des années 1700 environ. Or, Gaultier vit de 1575 à 1651. Et toc. Bon oui, d’accord, la sarabande serait originalement supposée être accompagnée de castagnettes et moi j’ai mis des sortes de tambourins. Ben d’une j’avais pas de castagnettes sur mon logiciel, et de deux c’est pas parce que dans l’Espagne du XVIe siècle elles étaient accompagnées de castagnettes qu’elles l’étaient également en France au XVIIe siècle. Et re-toc.
Une fois la sarabande terminée, je m’attaque aux canaries. Ce n’est qu’un morceau hein, très court d’ailleurs, ça s’appelle canaries avec un s, mais c’est une seule pièce. Le moyen français c’est relou. Là, pareil, je refais bien toute la partition dans mon logiciel, j’y fous du clavecin… et c’est de la merde. Je repasse en son de luth et voilà ce que ça donne :
Certains clavecins disposent d’un jeu luthé, c’est-à-dire qu’une petite barrette couverte de feutre ou de cuir qui vient s’appuyer sur les cordes pour en étouffer le son et donner l’impression qu’on joue du luth, il est donc possible que ces deux pièces aient été composées pour qu’on les joue de cette façon (sauf que j’ai pas cette option sur mon logiciel), mais il est également possible que ce soit des adaptations pour clavier de tablatures pour luth. Et oui au passage, les tablatures, ça remonte à loin, ce ne sont pas les « partitions pour les nuls » que beaucoup se figurent.
Les canaries donc, ou la canarie plutôt, est encore une fois une danse avant tout. Que nous dit Wikipédia en français ? Vraiment pas grands chose. Et en anglais ? À peine plus. Et en allemand ? Ah, là y a de l’info, là c’est pointu ! Seulement je cause pas allemand, enfin plus que très mal. Ce que j’ai réussi à comprendre de tout ça, c’est que c’est une danse qui nous vient des îles Canaries, qui a été très populaire en Europe au XVIe et au XVIIe siècles, et que généralement son tempo est plus rapide que celui d’une gigue. Et démerdez-vous avec ça. Je pense du coup que ma version n’est pas assez rapide, mais écoutez hein, ils n’avaient qu’à être plus précis dans les instructions sur la partition. Déjà qu’on n’est pas sûrs que ce soit une pièce pour clavecin à la base, et qu’on n’est même pas sûrs que ce soit Ennemond Gaultier et pas son cousin Denis, qui était aussi luthiste, le compositeur de ces deux morceaux ! Faudrait voir à faire un effort.
Est-ce qu’au moins ce Gaultier de Lyon est véritablement de Lyon, hein ? Ben non pardi ! C’est qu’il me ruine ma note de blog ce mec-là. Pour la peine on va l’appeler par son autre surnom, Gaultier le Vieux, ça lui fera les jambes. Gaultier le Vieux, donc, est né à Villette-Serpaize (à une petite trentaine de kilomètres de Lyon) en 1575 et serait mort à Les Nèves, qui serait aujourd’hui Salaise-sur-Sanne (à une bonne soixantaine de kilomètres de Lyon) en 1651. Niveau carrière : on dit qu’il aurait été page chez Antoinette de La Marck, Dame de Monsmorency, à l’age de sept ans ; on dit aussi qu’il aurait fait son apprentissage entre Toulouse et Pézenas, mais on dit également qu’il aurait d’abord travaillé à Lyon avant d’entrer au service de Marie de Médicis en 1620. Bref, on en dit des choses, et des choses pas sourcées. Vous voyez, c’est vraiment le merdier, et moi je ne suis qu’un simple blogueur, ni journaliste ni chercheur, qui s’est donné pour objectif de torcher un article par jour, alors ne comptez pas en apprendre plus ici parce que j’ai plus le temps. C’est déjà bien beau qu’on l’ait pas totalement oublié, Gaultier le Vieux pas vraiment de Lyon.