#214 – Lyonniais #040 – Faudra penser à revenir me voir de temps en temps

Je reprends sans avoir trouvé le moindre élément de réponse aux questions posées dans l’article précédent. Ce n’est ni la première ni la dernière fois que je me montre inconséquent. Toutefois, j’ai décidé de réduire cette dernière qualité, l’inconséquence, au minimum (façon de parler). Comment ? J’y viens.

Il y a déjà un bon moment, j’ai quitté le trombinoscope, n’étant pas d’accord avec l’utilisation qu’ils faisaient des données, les petits tests psychologiques auxquels ils s’adonnaient sans en informer les utilisateurs, leurs censures et les pubs insérées entre deux contenus créés par des utilisateurs. Je déteste vraiment la publicité, et je l’ai détestée davantage encore quand elle s’est glissée entre deux tranches d’amis pour donner l’illusion d’être du contenu comme un autre et non un moyen de vous manipuler pour vous faire cracher de l’argent. Il y encore bien des choses qui me hérissent le poil chez eux, mais je veux faire cours. Alors, au lieu de me plaindre plus longtemps, j’ai simplement décidé d’arrêter d’utiliser ce service.

Qu’en est-il de gazouilleur ? Je le déteste un peu moins que trombinoscope, mais on s’y bouffe aussi pas mal de publicité. Seulement voilà, moi-même j’y fais de la publicité, même si c’est pour un blog gratuit d’accès et, lui, sans publicité. Je m’en veux. Au lancement de Montpelliérien (aujourd’hui il y a de la publicité sur celui-ci, car n’ai pas les moyens de payer pour ôter la publicité de deux blogs gratuits si je veux conserver un toit sur ma tête et manger chaque jour (l’argent de la pub ne me revient pas, évidemment, il va à wordpress qui propose l’hébergement gratuit)), je ne voulais entendre parler d’aucun réseau social. Je rêvais de ces réseaux de blogs et de sites perso qui n’avaient pas besoin d’un hub central pour exister. Surtout, un hub détenu par une grosse entreprise privée. J’espérais que marche le bouche à oreille et que tombent dessus par hasard quelques internautes égarés dans la jungle du net. Là, j’ai été faible. Constatant que sans trombinoscope ni gazouilleur, j’étais rivé à 0 visites, j’ai cédé pour gazouilleur. Mais c’est fini. Enfin, c’est bientôt fini. Et tant pis si plus personne ne visite le blog. Je vivrai mieux avec moi-même.

Ce matin, j’ai appris que gazouilleur allait héberger ses données, les données des utilisateurs donc, de moi, de vous peut-être, sur le nuage du moteur de recherche au logo multicolore. C’est ce qui a fini de me pousser à quitter ce service également. Je n’en peux plus de cette boîte tentaculaire, celle au logo multicolore, dont plusieurs personnes ont démissionné ces dernières années à cause, selon leurs dires, de l’abandon de l’entreprise de toute forme d’éthique. Non, une entreprise sans morale, ça n’existe pas, hein ? Une entreprise qui pour faire encore plus de profit accepte de censurer les sites qui dérangent certains gouvernements au mépris d’une population de plusieurs milliards d’individus, une entreprise qui fouille dans vos e-mails pour vous fourrer sous le nez de la pub qui vous correspond (Est-ce que j’ai déjà dit que la pub c’était de la merde ?), une entreprise qui a accès à tout ce qui se passe sur trois téléphones en circulation sur quatre… Et j’en passe… Enfin, bon, en gros, je ne souhaite pas contribuer à faire grossir cette entreprise, donc fini. Fini quoi ? J’ai déjà dit, fini gazouilleur. Mais aussi fini gcourrier, fini toitélé (et pas seulement fini le compte toitélé, non, fini d’aller consommer du contenu sur toitélé, on trouvera autre chose qui n’engraisse pas le gigantesque troll), fini robotd’apparencehumaine aussi. Et le moteur de recherche ? C’était déjà fini depuis longtemps, en ce moment je suis sur canardcanardva.

Attendez, tant qu’on y est, je ne francise pas les noms des marques par haine de la langue anglaise ou des entreprises américaines, je suis pas patriote pour un sou, c’est seulement pour ne pas renforcer encore la présence de la marque telle qu’elle veut se montrer dans vos cervelles pour la milliardième fois.

Combien de temps ça va prendre pour arrêter tout ça ? Gazouilleur, c’est pour lundi, histoire que les quelques personnes qui venaient de là aient eu le temps d’apprendre qu’il faudrait venir par ses propres moyens (autant dire que plus personne ne viendra). Toitélé, c’est pour ce soir, le temps de virer mes propres vidéos, je me fiche de trouver une alternative tout de suite. Gcourrier ? Ça va être un peu plus long. Il va me falloir trouver une boîte qui m’est éthiquement plus sympathique et qui garantisse également une sécurité assez forte pour que je puisse y créer une adresse principale qui me serve pour les impôts, la caf, l’assurance maladie, tout ça quoi. Robotd’apparencehumaine aussi, il faudra que j’économise un peu pour acheter une téléphone non-intelligent (parce que la concurrence me débecte tout autant), mais ça ne me manquera pas, vu que j’ai pas internet dessus.

Restera encore le blog. Il faudra que je trouve une entreprise transparente qui propose des serveurs qui ne fracassent pas la planète (pareil pour la boîte e-mail) ou dans une moindre mesure que ceux de wordpress. Ça aura également le mérite de me coûter moins cher pour ce qui est de vous proposer du contenu sans pub autour, que ce soit pour mes projets en cours comme ce blog, ou ceux à venir. (Pour être hébergé sur les serveurs wordpress et virer la pub, c’est 48€ par an par blog, plus 18€ par an pour avoir une adresse en .com (qui avant était comprise dans le plan pour virer les pub mais plus maintenant)). Enfin bref, tout ça est en cours.

Vous aussi, vous trouvez que les entreprises qui fournissent les services que vous utilisez font vraiment de la merde et contribuent à pourrir le monde ? N’utilisez plus leurs services. Sinon, n’est-ce pas se rendre complice ? Promis je n’utiliserai plus cette phrase bien trop facile à l’avenir, c’était pour marquer la continuation d’avec hier. Mais enfin, quand même, y a un fond de quelque chose à méditer. Il me semble que quand on souffre de l’idée que des crevures assoiffées de pognon prêtes à sacrifier des peuples pour leur profit ruinent votre monde, il faut arrêter de participer à leur commerce à moins d’être vraiment maso. Et tant pis si on a pas l’air cool. Et tant pis si on a pas le dernier joujou à la mode. Et tant pis si c’est se battre contre des moulins à vent. Ces moulins à vent-là sont de vraies saloperies. Je veux pas le dernier joujou s’il est maculé de sang. Avoir l’air cool, c’est pour les cons.

J’ai toujours mal à la tête.

#213 – Lyonniais #039 – Naître coupable de rien

L’état du monde est tellement désolant que j’en suis paralysé. Parler de choses légères par volonté d’amuser plutôt que de déprimer quand des atrocités organisées sont commises partout, n’est-ce pas se rendre complice ? Parler des atrocités commises partout sans être sûr·e d’en comprendre les tenants et les aboutissants car tributaires d’informations partisanes défendant des intérêts qui nous échappent, n’est-ce pas se rendre complice ? Parler d’œuvres culturelles quand nous passons tant de temps à nous divertir au lieu d’agir pour un monde plus juste, n’est-ce pas se rendre complice ? Parler d’actions à mener quand on se rend compte que si plus de gens restaient chez eux à mater des séries en bon consommateurs et -trices feignant d’ignorer la misère de leurs voisins ils passeraient moins de temps à se demander comment et pour quelles bonnes raisons opprimer leurs voisins, n’est-ce pas se rendre complice ? Taper cette note de blog sur cet ordinateur depuis la France en sachant combien ont été exploités et -tées tout au long de la chaîne à l’autre bout du monde et en sachant quel est l’impact des fermes de serveurs qui l’héberge sur la bonne santé de la planète, n’est-ce pas se rendre complice ? Lire cette note de blog depuis votre ordinateur et les mêmes serveurs, n’est-ce pas se rendre complice ? Se placer à gauche de la ligne, se placer à droite de la ligne, rester sur la ligne, demander de quelle ligne vous parlez moi je n’en vois pas, n’est-ce pas se rendre complice ? Se mêler de quoi que ce soit comme ne s’occuper de rien, n’est-ce pas se rendre complice ? Naître et prendre de la place et des ressources dont d’autres manqueront, n’est-ce pas se rendre complice ? Mourir et abandonner les autres à leur misère au lieu de leur venir en aide, n’est-ce pas se rendre complice ? J’ai mal à la tête.

#212 – Lyonniais #038 – TL;PL : Revenez demain

Paraîtrait que je dois écrire une note de blog. Commençons tout de suite, car il est presque 22h. Je viens à peine de rentrer chez moi. J’étais à la soirée d’une association dont je faisais partie il y a quelques mois. Là, comme j’ai utilisé le passé, vous avez compris que je n’en fais plus partie. Très juste. Vous devriez songer à devenir détective privé. Mon amie, elle, s’y remet, je l’y ai donc accompagnée. Après une telle soirée, j’aurais des choses passionnantes à vous raconter sur les associations d’aide à la personne, leur financement par de grosses entreprises et de grands groupes industriels, pourquoi tout ça va mal finir. Ou comment il semblerait que ce qui inquiète le plus les gens aujourd’hui, ce sont les réseaux sociaux. Mais je n’en ferai rien car, voyez-vous, j’ai passé la dernière demi-heure de la soirée à me goinfrer de petits fours moins végétaux les uns que les autre, dans l’espoir d’être assez repus pour ne pas avoir à m’ouvrir un sachet de nouilles instantanées en rentrant. Non, je ne mange pas que ça. Sachez que je cuisine souvent, seulement avec trois supermarchés de produits asiatiques en bas de chez vous, vous aussi vous céderiez souvent à la facilité. Peut-être plus souvent que moi, même. De toute façon on ne saura jamais. Commencez pas à jouer à qui a la plus grosse. Bon, eh bien, ça a marché. J’ai le ventre plein. Je ne pense qu’à une chose, boire quelque chose de frais. Et aussi voir si on a enfin réussi à trouver un ami perdu de vue par l’intermédiaire d’un jeu en ligne auquel nous jouions tous deux il y a fort longtemps et la bonne volonté des anciens. Et m’écrouler sur mon lit pour lire la fin de Unlucky Young Men, dont je vous causerai sans doute un de ces jours. Sur le dos. Pour ce qui est de m’écrouler, sur le dos, pas vous causer d’Unlucky Young Men, car j’ai le ventre trop rond pour m’y coucher dessus. Donc, ben… À demain ! En espérant avoir quelque chose de plus intéressant à vous raconter. C’est que je culpabilise quand je suis inintéressant deux jours d’affilée. Oui, je culpabilise souvent.

Photo par Bloubliblou

#211 – Lyonniais #037 – Jouer ou lire, il ne faut pas forcément choisir. Enfin, si, il est question de faire des choix mais… Ne compliquez pas tout, s’il vous plaît.

Qu’est-ce qui est moins attractif qu’un jeu vidéo et plus qu’une nouvelle amateur ? C’est le jeu textuel. Quoi, vous ne connaissez pas ? On ne vous en voudra pas. Si je ne comptais pas parmi mes amis un garçon assez actif du petit milieu de la fiction interactive (autre nom du jeu textuel) francophone, il est fort probable que je n’en saurais rien moi-même. Qui est ce garçon ? C’est Feldo. Z’avez vu ? J’ai pas peur, je balance les noms. Qu’aimerait-il au plus profond de lui ? (Il me l’a pas dit car il est pudique mais je le sais.) Que ces jeux, gratuits dans leur grande majorité, qui demandent souvent un temps fou à fabriquer par des gens passionnés d’écriture, de lecture et de programmation, soient un peu plus joués, tout simplement.

Comment vous décrire ce type de jeux ? Je n’emploie pas le terme « genre », car, comme en littérature, on peut y trouver de la science-fiction, de l’horreur, du policier, du journal intime… Hé bien, le plus simple serait de partir des fameux Livres dont vous êtes le héros, dans lesquels vous incarnez un personnage pris dans une aventure. Vous connaissez sans doute. Dans ces livres, chaque page décrit une situation dans laquelle se trouve votre personnage et vous propose des choix. Selon les caractéristiques du personnage, les objets qu’il possède ou simplement selon ce que vous préférez lui faire faire, on vous demande alors de vous rendre à telle où telle page afin de poursuivre l’histoire, et rebelote : lecture, jets de dés, choix… Jusqu’à en arriver au dénouement, heureux ou non, selon les choix que vous aurez effectués et la réussite, ou non, de vos actions. Ainsi, vous aurez pu lire une nouvelle à multiples embranchements dont l’issue aura été, en partie, déterminée par vos actions. Si vous recommencez le jeu en effectuant des choix différents de ceux pour lesquels vous aviez opté au cours de votre première partie, l’histoire que vous lirez s’en trouvera modifiée, ou bien dans sa conclusion, ou bien dans la manière d’y parvenir.

Aujourd’hui, quand on parle de jeu textuel, on ne fait souvent plus référence au support papier, mais à des jeux numériques qui se jouent sur ordinateur, et c’est de ceux-là dont je vais vous causer ici.

Les Livres dont vous êtes le héros et jeux apparentés (qui existent également sur ordinateur), de par leurs fiches de personnages et leurs jets de dés, sont à rapprocher des jeux de rôle de type Donjons et Dragons, pour un·e seul·e joueur·euse et dont le livre se substitue au meneur de jeu, mais ce n’est pas forcément le cas de tous les jeux textuels. Certains sont totalement dénués d’aléatoire et de points de vie ou de compétences, et proposent simplement des choix libres reposant sur la simple curiosité de la joueuse ou du joueur de voir ce qui se passera dans tel ou tel cas. Dans ces derniers, on clique le plus souvent sur des liens hypertextes qui vous emmènent au passage suivant. Dans d’autres, plus proches de l’esprit des jeux vidéos d’aventure à la LucasArts (Monkey Island, Loom…), ou des désormais très à la mode et très grandeur nature Escape Room, il vous faudra fouiller dans un environnement décrit par l’auteur·e, à la recherche d’objets clés, d’issues diverses, et faire des choix efficaces au cours de dialogues avec d’autres personnages. Bref, il vous faudra mener l’enquête. On pourra à cette fin cliquer sur des liens dans certains cas, et dans d’autres taper soi-même du texte pour découvrir son environnement et interagir avec lui. Le plus souvent un verbe suivi d’un nom d’objet ou de lieu (du genre regarder ouest, ouvrir porte, prendre potion, enfin, z’avez pigé.). Je vous donne ici les trois modes de jeu les plus courants, mais il en existe bien plus. Tout ça est très varié.

Certains de ces jeux se parent de quelques éléments graphiques, la plupart du temps rudimentaires (voire de musiques d’ambiance) mais pour nombre d’entre eux il n’y a que du texte à se mettre sous la dent de l’œil. Dit comme ça, ça peut sembler tristounet, seulement puisque vous en êtes à lire cette grossière et bien aride description de la fiction interactive jusqu’ici, je suppose que vous n’ignorez pas le pouvoir propre à l’écriture d’invoquer tous les sens ainsi que les émotions les plus diverses chez une lectrice ou un lecteur. Cela dit, rien ne vaut d’y jouer soi-même pour se faire une idée du machin, et, oh! coïncidence, il se trouve que le site http://www.fiction-interactive.fr a organisé cette année encore un concours pour lequel cinq jeux ont été créés tout spécialement. Jeux auxquels vous pouvez jouer dès aujourd’hui, et même (et là j’en appelle à vos pulsions sadiques) mettre une note.

Outre ce concours, vous trouverez sur ce site une centaine de jeux textuels en français créés entre 2001 et aujourd’hui. Y en aura pour tous les goûts, de tous les genres et modes de jeu. Vous y trouverez également des tutoriels pour créer vous-mêmes vos fictions interactives, car là réside également l’intérêt de ce type de jeux : en fabriquer est de plus en plus accessible au grand public. Sont disponibles aujourd’hui tout un tas d’outils gratuits et bien documentés qui vous permettent de sauter la case programmation pour vous concentrer sur l’écriture des textes à proprement parler, si l’informatique vous rebute mais que la forme vous plaît. Si, au contraire, vous voulez plonger les mains dans les rouages cambouineux (ça n’existe pas) du code sans avoir peur d’y laisser des doigts et de nombreuses heures de votre vie, ben, je vous l’ai déjà dit, une pile de doc vous attend sur le site nommé plus haut ainsi qu’une communauté au nombre d’individus réduit mais fort active et bien intentionnée.

Eh oui, je sais ce que vous allez me dire, je déteste la publicité et pourtant aujourd’hui j’en fais un peu pour ce site. C’est vrai, mais, d’une, on ne m’a rien demandé, de deux, je ne fais absolument pas partie de l’équipe qui gère ce site, et, de trois, je n’y gagne rien sinon la satisfaction de porter un très modeste éclairage sur le travail de personnes qui ne font ce qu’elles font que par amour de ce qu’elles font. Alors, grognons, grognonnes, je vous embrasse bien affectueusement, et je vous dis à demain.

#210 – Lyonniais #036 – Plutôt me les couper que de ne pas avoir le choix de ne pas le faire

Ce matin, alors que j’étais en train de lire l’article de Gérard-François Dumont, Japon : le dépeuplement et ses conséquences, publié en 2017, je reçois l’e-mail d’une amie qui m’y cause (non, elle ne mycose pas, lisez mieux) d’amie enceinte et me demande si j’ai déjà envisagé de me faire faire une vasectomie (car l’idée que je me reproduise fait frissonner pas mal de monde, savez-vous). Vous ne voyez pas le rapport ? Ou alors peut-être vous demandez-vous si je pense qu’en me vasectomiant (ça n’existe pas plus que le verbe mycoser, cherchez pas) je craindrais quelque part de contribuer au dépeuplement de la France et à ses conséquences ? Non, vraiment, vous me prenez pour un Eric Z. ? Sans déconner…

Eh bien non, c’est que mon inculture est si profonde qu’à chaque nouvel article que je lis, j’apprends quelque chose. La plupart du temps, même, quelque chose que tout le monde sait certainement déjà. Dans l’article cité plus haut, j’apprends donc que « le Japon vote une « loi sur l’eugénisme national » mise en œuvre en 1948. L’objectif affiché est d’empêcher la naissance d’enfants considérés comme présentant des handicaps et de protéger la vie et la santé des mères. Aussi la loi rend-elle obligatoire la stérilisation des porteurs d’un certain nombre de caractéristiques jugées négatives et l’avortement pour raison de santé ou motifs sociaux ; le nombre des stérilisations s’élève de 5 600 en 1949 à 38 000 en 1955. Quant au nombre des avortements officiellement recensés, il dépasse le million de 1953 à 1961, avec un taux rapporté aux naissances qui atteint même 71,6 % en 1957. »

Ça vous la coupe hein ? C’est le cas de le dire. La coïncidence était trop belle pour moi qui ne savait, une fois encore, pas quoi vous raconter, du pain béni, comme on dit. Eh bien oui. Depuis mes dix-huit ans, j’y pense vaguement, à la vasectomie. D’où me vient donc cette idée ? De mon incapacité à pouvoir garantir à l’enfant que je mettrais hypothétiquement au monde une vie sans souffrance, ainsi qu’au refus de penser cyniquement « de toute façon, tout le monde souffre. » Vivre m’a bien des fois été insupportable, au point qu’il n’y ait pas un seul jour qui passe sans que je ne songe à la mort (sinon à me la donner, du moins comme elle doit être apaisante quand elle vient finalement et cesse d’être une source d’anxiété permanente). Pourtant, si je devais comparer mon existence à celle de la majorité des êtres ayant vécu sur cette terre, mon parcours en ce monde apparaît comme une véritable balade à la fête foraine par un beau soir de printemps. Je me demande ce que ça doit être pour ceux et celles dont la misère est des plus totale. Parfois, donc, quand je pense à tout ça, je me dis que je préfèrerais me les couper moi-même au couteau à beurre plutôt que d’assister impuissant à la douleur de celui ou de celle à qui je n’ai pas demandé l’avis avant d’égoïstement le ou la plonger dans un enfer qu’à sa naissance je n’ai pas voulu regarder en face.

D’un autre côté, il y a des gens très heureux. Des qui ont vécu des horreurs, mais qui sont malgré tout à peu près satisfaits d’être là. Et moi-même, si aucun jour ne passe sans que l’angoisse ne vienne faire un peu d’ombre à mon bonheur, je me sens ces derniers temps plutôt bien que mal et j’ai, par le passé également, eu quelques beaux moments de fou-rires et de joie. Attention, aucun de ces beaux moments ne vient se rappeler à ma mémoire quand ça ne va pas, mais ils ont été là et continuent de se produire. Certaines relations parent-enfant sont également sources de joies intenses et de bien-être qui peuvent vous faire relativiser les tracas de l’existence, et il ne fait pas de doute que les enfants sont souvent les meilleurs remèdes à la morosité ambiante du monde des adultes.

Alors quoi faire ? Je n’ai pas fini de me poser la question. Et justement, j’ai envie d’avoir longtemps l’occasion de me la poser, donc point de vasectomie à l’ordre du jour. Étant d’un caractère à détester toute injonction ou tentative de coercition, d’où qu’elle provienne, des lois comme celle promulguée dans le Japon d’après-guerre me donneraient envie de me les arracher pour les coller au fond de la gorge de ceux qui l’ont votée. Histoire d’être bien sûr de n’imposer ce monde où règnent les raclures à aucune éventuelle descendance, et à la fois de bien leur faire comprendre ce que j’en pense, de leur autorité autoproclamée sur mon corps, ma personne, à ces décideurs-à-ma-place. Plutôt me les couper que de n’avoir pas le choix de ne pas me les couper, en somme. Mais dans ma région du monde et à mon époque… je ne peux pas me résoudre à un acte aussi définitif.

Moi qui n’aime pas l’idée des tatouages de par leur caractère permanent, vous imaginez si l’aspect définitif de la vasectomie me séduit peu. C’est qu’en dix ans, j’ai beaucoup changé. Pas tant physiquement que dans mes idées et ma façon d’être, ou par les désirs et les aspirations que je nourris. Aujourd’hui, si je ne veux pas d’enfant (et je n’en veux pas) je peux très facilement me retenir d’en avoir sans vasectomie. Même si, oui, l’amour est meilleur sans capote et sans se retirer juste avant de jouir. Mais qui sait où j’en serai dans dix, quinze ans ? Je me laisse donc le choix de pouvoir choisir jusqu’au bout, car en ce qui concerne l’avenir, je ne suis sûr de rien. En ce qui concerne le bonheur de ma voisine ou mon voisin comme des mes rejetons virtuels, je ne suis sûr de rien. En ce qui concerne le bienfondé d’avoir ou ne pas avoir d’enfant à tel ou tel âge, je ne suis sûr de rien. En ce qui concerne l’intérêt qu’il y a à vivre, je ne suis sûr de rien. Il y a bien une chose dont je suis certain cependant, c’est que je serai toujours prêt à défendre une société qui permet à chaque individu d’effectuer ses propres choix vis-à-vis de sa volonté ou non de se reproduire (comme de se donner la mort) quitte à ce qu’il se trompe et le regrette, car disposer de soi-même, c’est bien la moindre des réparations à accorder à des êtres qui n’ont jamais choisi d’être là.


#209 – Lyonniais #035 – Des hauts débats

J’ai entendu causer, mais vraiment comme ça en passant, d’un grand débat national. J’avoue ne pas bien savoir de quoi il s’agit, mais je me demande tout de même s’ils vont trouver une salle avec assez de place pour faire entrer tout le monde, et si l’on va faire fabriquer des sièges pour l’occasion ou si chacun·e devra amener son propre tabouret. Et l’ordre du jour, comment va-t-on en décider tous ensemble ? Ça risque de prendre du temps mais on ne pourrait décemment pas éviter d’en passer par là. Une fois installés et -lées dans la grande salle qu’il faudrait donc penser à faire construire assez vite, devra-t-on inscrire sur un petit morceau de papier les sujets dont on veut débattre et le faire passer en bout de table, la personne en bout de table récupérant les feuilles de sa rangée et les faisant à son tour passer à la personne devant elle et ainsi de suite, jusqu’à ce que tous les petits papiers arrivent au bureau du président qui les lira à voix haute et procédera à un vote à main levée pour décider des sujets que l’on garde ou pas ? Évidemment, il ne faudra pas se tromper entre le papier qu’on fait passer au président et celui qu’on comptait faire passer à Nicole ou Nicolas et sur lequel était inscrit : « est-ce que tu veux bien sortir avec moi ? oui / non, entoure la réponse », sinon on n’y arrivera jamais. Ce projet me paraît bien ambitieux, mais je suis sûr que ceux et celles qui l’ont organisé ont tout prévu et qu’ils y mettront les moyens pour que chaque Française et chaque Français ait son mot à dire, voit ses questions étudiées, et que des temps de paroles égaux pour les soixante-sept millions d’habitants et -tantes que nous sommes soient scrupuleusement respectés, sans ça, ça ne sert à rien. Personnellement, moi, je voudrais que soit discuté le rapport qu’entretient la société au bien-être de l’individu, ce qui, je l’espère, ne devrait pas manquer de déclencher une réflexion sur la mort, l’absurdité de la vie, et la place du travail et de l’argent dans tout ça. Je sens que ça va être passionnant.

#208 – Lyonniais #034 – Faut pas avoir la tremblotte pour jouer au Mikado

J’étais tranquillement installé à la table d’un café sur les bords du Rhône, table stratégiquement choisie pour son exposition plein soleil (j’ai passé douze ans à Montpellier sans être foutu de savoir distinguer le nord du sud, alors ne me demandez pas d’être plus précis après quatre mois à Lyon), en train de boire un —surprise— café, quand je tombai sur cette note de bas de page du Japon pré-moderne (1573 | 1867) de Ninomiya Hiroyuki (二宮 宏之) : « Le shôgun est donc dit taikun et l’empereur, le tennô, est alors désigné par le mot mikado« .

Ça alors ! que je me dis, c’est donc sûrement de là que vient le nom du jeu si célèbre et si déclencheur de fou-rires, dans une tentative de me trouver intelligent en dépit de mon incapacité à retenir une seule information de l’enchaînement de noms de seigneurs et de fiefs, de dates et de revenus convertis en quantité de riz (koku [石]) qu’un tel ouvrage académique de civilisation ne manque pas d’offrir. Et justement, à découvrir cette succession sans répit de prises de pouvoir par divers partis à la suite de ruses et de coups de force, j’avais été amené à penser que le jeu du Mikado représentait symboliquement le fait de mettre de son côté, ou de vaincre, les divers seigneurs en place un à un et en toute discrétion, sans inquiéter les autres (ce qui vous ferait courir le risque qu’on s’aperçoive de vos ambitions et qu’on trouve un moyen de vous écarter plus ou moins brutalement de ce jeu de pouvoir), c’est-à-dire sans les pousser à bouger, jusqu’à enfin obtenir la plus puissante des positions, celle de mikado. Le Mikado étant, dans le jeu, le bâtonnet octroyant le plus de points au joueur qui le possède.

Le terme mikado, qu’on pouvait utiliser pour évoquer le tennô, l’empereur donc, et qui servait originairement à désigner le palais impérial, a été employé selon différentes sources de l’internet (qui reprennent toutes mot à mot les mêmes phrases et sans source donc je m’en méfie) au cours des époques Heian et Edo. À l’époque Heian (794 – 1185) et à l’époque Edo (1603 – 1868), ou de l’époque Heian à l’époque Edo ? Je n’en sais rien et, pour tout vous dire, ça ne fait pas une grande différence concernant l’origine du jeu du Mikado, car (toujours selon l’internet sans source) des descriptions du jeu existeraient déjà dans des textes bouddhiques du Ve siècle avant l’an 0 de notre calendrier grégorien. Le Mikado n’est donc pas un jeu d’origine japonaise symbolisant les luttes de pouvoirs de ce pays. Ma fulgurante déduction s’en trouva donc vaporisée, me laissant nu au milieu des références historiques qui me passaient au dessus de la tête comme autant de vautours affamés de ridicule se payant copieusement ma tronche. Hein ? Non, effectivement, je ne suis pas plus doué pour le lyrisme que pour retenir une simple suite chronologique d’évènements. Ô, à quel point je m’étais planté. Le nom du jeu tel qu’on le connaît aujourd’hui en France lui vient même de la marque d’un fabriquant de jeux, alors qu’on le connaît sous l’appellation pick-up sticks, jackstraws et spillikins dans les régions anglophones, et de jonchets, ou onchets, dans la France du XIXe siècle.

Bon, ben, je préférais mon explication. Et quoi qu’on en dise, que ce soit pour jouer au Mikado ou pour devenir mikado à la place du mikado, faut pas avoir la tremblotte.

#207 – Lyonniais #033 – Il est 19h18 et je mange des céréales

Le titre de cet article aurait pu être « Avez-vous déjà transporté des meubles dans le métro ? Moi je viens de le faire, je ne vous le conseille pas » ou bien « Aujourd’hui j’ai acheté huit livres en japonais parce qu’ils coûtaient que dalle sans savoir de quoi ils parlaient, résultat je me retrouve avec la biographie d’un ultra-capitaliste et un manuel pour lire son avenir selon son groupe sanguin », ou encore « hier j’ai encore dormi six heures, j’ai besoin d’une nuit complète sinon je vais finir par agresser quelqu’un, et expliquez-moi à quoi ça sert d’être sans emploi si on n’a même pas le temps de dormir ? » ou même « Y vont bien finir par s’apercevoir que sous prétexte de trouver des titres hypothétiques je ne vais, une fois de plus, rien écrire d’intéressant aujourd’hui », ou alors « Dans dix minutes je suis en pyjama et j’en sors pas avant lundi ». Mais non, c’est « Il est 19h18 et je mange des céréales », ce qui n’est déjà plus vrai puisqu’il est maintenant exactement 19h26 et que j’ai fini de manger mes céréales pour pouvoir écrire ce texte. C’est du voyage dans le temps à pas cher. Profitez, c’est cadeau. Allez, j’arrive plus à garder les yeux ouverts et du coup je tape à côté des touches que je vise sur mon clavier, c’est signe qu’il faut que je vous laisse. J’essaierai de me rattraper demain. Bisettes.

#206 – Lyonniais #032 – On fait comme on a dit

« Allez, d’accord, mais une heure et c’est tout. Juste une petite heure. Toute petite. Dans soixante minutes, pile, on se lève. » Combien de fois l’avez-vous dit, combien de fois entendu ? En tout cas, ce dont je suis sûr c’est que vous n’avez jamais respecté votre parole, et moi non plus. Une demi-heure, une heure, c’est la durée annoncée de la sieste de 17h30. Celle d’après plusieurs nuits à moins de six heures de sommeil. Dans les faits ce sera une heure trente, deux heures de sommeil au minimum, et un réveil snoozé cinq, six fois entre temps. Par exemple, là, je vous écris depuis l’année 19h36. Hein ? J’ai dit année ? Commencez pas, j’ai aucune patience quand je me réveille en retard d’une sieste qu’a débordé. Surtout quand je sais que je devrais retourner dormir dans trois heures, juste quand je commencerai à être assez alerte pour ne pas retrouver le sommeil. Vraiment, ça me met d’humeur à envoyer chier la terre entière. La première chose que j’ai pensé en coupant mon réveil pour la dernière fois, c’est « m’en fous, je l’écrirai pas cette putain de note de blog. Z’ont qu’a venir se plaindre si y zosent, cette bande d’internautes de mes deux, d’une seule main que je me les prends et que je leur fais bouffer leurs clavier par le cul. » Oui. Ça me rend grossier aussi. Alors voilà ce qu’on va faire : moi, je vais me convaincre que ces quelques phrases tapées tant bien que mal, les paupières encore collées l’une à l’autre et la marque du drap incrustée sur la joue, suffisent amplement à remplacer le billet sur le Musée des Confluences que je voulais vous écrire aujourd’hui parce vous ne méritez pas mieux, et vous, de vôtre côté, vous allez vous en satisfaire sans broncher parce que, de toute façon, quel choix vous avez ?

Non sans déconner, faites pas de sieste à 17h30. C’est JAMAIS une bonne idée.

#205 – Lyonniais #031 – Dehors, il fait beau. Et dedans ?

Aujourd’hui, à Lyon, il fait bon. Non, beau, pardon. Deux jours de suite, ça faisait longtemps que ce n’était pas arrivé. Il fait froid, certes, mais le ciel est Montpelliérien. C’est-à-dire d’un grand bleu sans nuage. Donc beau, mais pas bon, car ce dernier terme supposerait une température agréable. Or, à 11h, l’herbe des parcs était en grande partie toujours givrée, du moins près des fleuves. Ça ne vous intéresse pas ce que je raconte ? Vous avez en horreur la petite conversation météorologique ? Ne vous inquiétez pas, c’était juste une introduction.

De nombreuses personnes ressentent une difficulté à conserver leur bonne humeur lorsque la grisaille perdure. Z’ont beau se dire qu’au-delà du tapis de nuages étalé au-dessus de leur tête il fait tout bleu et que le soleil chauffe, ça n’y change rien. Question de vitamine D, j’imagine. Suis pas biologiste. Je croyais moi-même faire partie de ce groupe-là. Eh ben pas forcément. Mon humeur est bien plus constante que lorsque les jours de grands soleils alternaient inlassablement avec les nuits très noires. Fulgurantes excitations dès le matin, sentiment d’être un ouistiti en cage chaque soir, et donc frustrations monstres, et donc déprimes chroniques. Alors qu’ici, bah… c’est toujours un peu pareil. Je me lasserai sans doute de la monotonie comme je me suis lassé de ces hauts et bas quotidiens au sein des mêmes 24h. Je vais même vous dire, il y a plusieurs semaines de ça, après un bon mois de gris 25% en continu, le ciel s’est dégagé une petite heure et ce salaud d’astre solaire en a profité pour me balancer ses rayons en plein dans la gueule. Eh ben je me suis senti agressé. Oui, rien que ça. Agressé. De quel droit venait-il me sortir de mon petit confortable cocon grisounnet pour me foutre un coup de speed soudainement ? Surtout si c’était pour repartir aussi sec qu’il était apparu ? Non mais franchement.

La bonne humeur, ça se cultive indépendamment du temps qu’il fait. Mais encore faut-il avoir bien préparé le terreau dans lequel on compte la faire fleurir. Ah non, merde, je me trompe de post. Le discours imagé c’était hier. Enfin tant pis, continuons cinq secondes puisqu’on a commencé. La bonne humeur se cultive, donc, cependant il est clair que chacun·e ne part pas avec les mêmes outils de jardinage, et n’a pas forcément les mêmes chances d’acquérir les plus solides d’entre eux. Hmm. En fait j’ai fini, j’ai plus d’idée pour filer la métaphore. Ah si, personne à ma connaissance ne dispose de la notice desdits outils. Mais de toute façon, d’une j’ai jamais vu de notice accompagner les outils de jardinage, et de deux ça commence à devenir lourdingue alors j’arrête pour de bon. Ce que je voulais dire en bref, c’est que s’il ne fait pas beau ni bon dehors, il reste sans doute toujours possible de faire en sorte qu’il fasse beau à l’intérieur, bien que ce soit loin d’être simple. Et aussi que j’ai pris ces deux photos il y a longtemps et que je voulais les caser quelque part, il me fallait donc bien broder quelque chose autour.

Alors, brillez les amis·amies. Brillez pour vous, brillez pour moi, brillez pour celles et ceux qui vous entourent. Ne laissez pas la météo décider forcément du temps qu’il fera sous votre caboche et dans votre petit cœur. Et si vous n’y arrivez pas tout de suite ni à tous les coups, ne vous exaspérez pas malgré mes exhortations, car vous savez bien que je raconte souvent des conneries. Ce qui marche peut-être pour moi, et encore c’est loin d’être sûr, ne marche peut-être pas pour vous, voire ne marche pas du tout. Mais laissez-moi espérer un peu quand même, ça me fait du bien.

Peut-être une dernière chose tout de même, concernant les notices explicatives relatives au bonheur. Moi, je serais vous, je me méfierais de celles et ceux qui cherchent à me les vendre.

Allez, à demain. J’espère quand même qu’il fera beau.