#204 – Lyonniais #030 – Métaboles et paraphores

Il y a les choses qu’on dit clairement et celles qu’on ose seulement murmurer. Au dessus et en dessous, amplitudiquement parlant, il y a les choses qu’on hurle et les choses qu’on tait. Cet après-midi, je disais à mon amie que j’avais écrit les quatre dernières notes du blog sans problème et que donc, ça y était, j’abordais le cycle de la semaine et demie à ne plus savoir quoi dire. Enfin, pas tout à fait ça. Que j’avais à dire certaines choses, mais que je n’osais pas, pour diverses raisons, et que donc je n’avais rien à dire. Elle m’a donc proposé de les dire, ces choses, mais sous forme de paraboles, de métaphores. Eh, pourquoi pas ? Tentons l’expérience.

Une larve qui ne pouvait se résoudre à faire caca dans son propre cocon, de peur de se noyer sans doute, mais ne sachant trop comment sortir sans se faire picorer des oiseaux, préférait ne pas faire caca du tout quitte à mourir d’occlusion intestinale. Une puce qui passait par là, sautant allégrement, légère de pouvoir déféquer quand elle le voulait, vit la larve toute enflée de s’être tant retenue en train de se tortiller. « Toi, lui dit-elle, tu m’as tout l’air d’avoir envie de faire caca. -C’est bien vrai, lui répondit la larve, car je me retiens depuis fort longtemps. J’ai trop peur de me noyer dedans -Fais comme moi, lui proposa la puce, je ne fais caca que de toutes petites crottes sèches et noires, bien calibrées. Ploc ploc ploc. Nulle coulure. Ainsi je suis à mon aise pour gambader par chiens et par chats en sautillant gaiement. » Et c’était vrai, les puces font de toutes petites crottes sèches et noires et passent ainsi leur temps à sauter, c’est pour cette raison qu’on les nomme les lapins du monde des insectes. « Si tu procèdes ainsi, reprit la puce, tu ne pourras pas te noyer. Enfin, ne mange pas trop de fibres quand même… et évite les laitages. » Sur ce, la puce sauta sur un hérisson qui passait juste en dessous, mais rata son atterrissage et alla s’empaler sur une épine. Voyant ceci, la larve qui s’était presque laissée séduire par ce discours, dut serrer les fesses plus fort encore qu’au départ, car dans la perspective du soulagement à venir, elle s’était relâchée un peu, et il est fort dur de se reprendre après ça. Tellement dur en vérité qu’elle ne put s’y tenir. Elle attendit que la nuit fut bien opaque et totalement silencieuse pour se risquer à glisser ses fesses par une minuscule ouverture hors de sa capsule de soie. Mais à peine eut-elle sorti son cucul du cocon pour faire caca qu’un coucou la croqua. « Beuark ! s’écria le coucou. Elle avait vraiment un goût de merde celle-là. »

Voilà, voilà. Oh je sais, je ne suis pas un roi de l’allégorie, et vous aurez bien sûr toutes et tous deviné le fond de ma pensée sans que j’aie besoin d’en rajouter. Mais, ça m’a fait du bien de pouvoir me livrer sans pour autant me sentir trop impudique, sans me rendre trop vulnérable. Je ne sais pas bien de quoi je pense me protéger ainsi, car quand on a des convictions politiques aussi fortes que celle-ci, qu’importe l’enrobage au fond, elles se repèrent au premier coup d’œil. Enfin… Méditez bien là-dessus, et à demain.

#203 – Lyonniais #029 – Une histoire comme tant d’autres

Un homme en imperméable noir s’avance parmi la foule alors qu’autour de lui tous et toutes reculent. Son pas est assuré, bien qu’il boite un peu. Personne n’est parfait. Une fine moustache souligne le contour de sa lèvre supérieure dont la forme est symétrique à celle d’un doublevé par rapport à un axe horizontal, ce qui est fort commun malgré la description quelque peu ampoulée. Il tient à la main un petit objet sphérique. Vraiment très petit. Non, plus petit que ça encore. Voilà, à peu près. De la taille d’une bille, donc, qui aurait rétréci sous la pluie, et non au lavage, car on ne met pas les billes à la machine. En vérité, l’objet est tellement minuscule que la femme vers laquelle il s’avance a l’impression qu’il joint simplement l’extrémité de son pousse à celle de son index, formant un cercle dans l’espace ainsi délimité par ses deux doigts, afin de lui jouer une mauvaise blague de collégien. Mais il n’en est rien. Arrivé à son niveau, l’homme passe à côté d’elle sans même sembler la considérer. Comprenant alors qu’elle n’est pas l’un des personnages principaux de cette histoire, elle se met à reculer comme le reste de la foule.

L’homme a maintenant parcouru bien des mètres en ligne droite et la foule n’a cessé de reculer, si bien que lui se retrouve seul à un bout de la rue dont les néons refoulent la nuit à renfort de photons fluo, et que les autres s’agglutinent à l’extrémité opposée de la chaussée. La masse des piétons étant mal répartie, la rue s’est mise à pencher. L’homme en imperméable noir doit se plier en deux pour gravir ce qu’il lui reste de chemin à parcourir. Il en est même contraint à poser ses mains sur la paroi de bitume afin d’adhérer mieux à la côte et ne pas glisser. Grace à son long imperméable, la foule est incapable d’apercevoir son derrière et de lui faire des commentaires désobligeants quant à sa taille, sa forme ou sa couleur. Grace à sa fine moustache, la pluie ne ruisselle pas jusqu’à l’intérieur de sa bouche, mais reste stockée dans le poil, ce qui n’est pas inutile si l’on se met à avoir soif et qu’on ne dispose pas d’un verre pour recueillir l’eau qui tombe. Ainsi, il continue à grimper, l’esprit tranquille.

Après d’éreintants efforts, l’homme en imperméable noir, à bout de souffle, parvient au sommet de la rue. Il se retourne alors et, toisant de son perchoir la foule en contrebas dont les membres, ne pouvant reculer plus, ont fini par s’imbriquer et former une ligne bien droite d’un trottoir à l’autre, il hurle de tout ses poumons : « ATTENTION !!! » Puis, délicatement, il pose à ses pieds l’objet qu’il n’avait pas lâché durant toute son ascension. Celui-ci se met à rouler en suivant la pente. Il roule, il roule, il roule, il roule, prenant de la vitesse à chaque seconde, une vitesse fantastique, inédite ! Tout en bas, la foule retient son souffle. « Ça arrive », disent certains, « tenez-vous prêts » intiment d’autres. Ainsi, tous et toutes se tiennent prêts et prêtes, chacun et chacune étant très bien au courant que ça arrive. L’homme en imperméable noir, n’entendant pour sa part rien de particulier, sans doute à cause de la distance, et le temps se faisant long d’être perché seul et si haut, finit par dévaler lui-même l’asphalte à toutes jambes et rejoindre la ligne humaine. « Alors ? » lance-t-il une fois à la portée des autres. « Alors, lui répond l’une d’entre eux, c’était trop petit, on l’a pas vu passer. »

#202 – Lyonniais #028 – L’écriture inclusive, c’est bien mais pas top

Depuis l’ouverture du blog Montpelliérien, et donc maintenant sur Lyonniais, je tente de me tenir comme je le peux à l’écriture inclusive. Ce qui n’est pas facile. L’écriture inclusive, je trouve ça intéressant et je la vois d’un mauvais œil à la fois. Je vais essayer de m’expliquer brièvement, parce que j’ai la flemme d’écrire. J’en ferai peut-être un article complet un jour, étayé de citations et appuyé de sources universitaires solides une autre fois. Là je vais tout balancer en vrac comme ça me vient.

Ma première rencontre avec l’écriture inclusive fut un texte dont j’ai oublié le titre et la provenance et qui disait, d’après ma piètre mémoire, qu’il fallait cesser de mettre les femmes entre parenthèses. On ne devait plus écrire un(e) marchand(e), par exemple, et on y prônait l’utilisation du « · » que désormais tout le monde connait. J’avais été assez agacé par le ton de l’article qui semblait donner des ordres quant à la manière dont tout un chacun (toute une chacune ?) devait écrire, car je considérais que le langage est propre à chaque personne et ne doit en aucun cas se conformer à des règles dictées par une quelconque autorité, que celle-ci soit l’académie française ou un groupe militant. Mon langage m’appartient comme le tien t’appartient à toi. Ton orthographe, tes expressions, tes tournures de phrases comme ton accent, c’est toi. C’est sympa une langue commune, c’est encore mieux une langue riche de mille variations à l’écrit comme à l’oral. Bref, chacun·e sa langue, et se comprenne qui pourra, pour les autres on fera appel à un tiers chargé de traduire. Je trouvais également que tout cela était bien symbolique, et le symbolique moi, ça m’emmerde. C’est de la poudre aux yeux. Le symbolique, c’est beau, c’est tape-à-l’œil, ça n’explique rien, ça pousse à agir selon l’affect et pas la raison, c’est l’outil principal du conformisme bêbête, et le conformisme bêbête est l’outil principal du harcèlement de minorités par des majorités qui se pensent dans leur bon droit parce que ben, euh, c’est la majorité quoi, les autres n’ont qu’à s’écraser. Entre un(e) marchand(e) et un·e marchand·e, la différence me paraissait purement symbolique.

Cela dit, je me suis aperçu avec les années et à force de lecture, que même si on évacuait cette question des parenthèses ou du point médian, les textes qui me tombaient sous le nez s’adressaient implicitement aux hommes en grande majorité. Surtout chez ceux et celles qui aiment écrire comme on parle. Les adresses directes aux lecteurs et aux lectrices étaient en fait des adresses à des lecteurs seulement. Des « hé, les mecs », ou des « quand votre femme » partout, supposés s’adresser au lectorat en général. Par contre, des « hé, les nanas » qui ne s’adressaient, eux, qu’aux femmes spécifiquement. Dérive logique et qu’on ne voit pas forcément venir du neutre masculin. Hors, moi, je ne voulais pas écrire seulement pour les hommes ou seulement pour les femmes, je voulais écrire pour tout le monde, sans qu’on ait la sensation d’une conversation en non-mixité (non-mixité dont d’ailleurs je comprends bien les avantages majeurs lors d’évènements liés à la condition des femmes, mais qui me paraît tout de même avoir ses limites et ses problèmes dans une société qui découvre, à raison, que le genre n’est que construction sociale). Je me suis donc demandé quelle était la meilleure manière de résoudre ce problème. Eh ben je n’ai toujours pas trouvé.

La raison première de mon passage à l’écriture inclusive était donc de me forcer à voir quand moi aussi je m’adressais sans m’en rendre compte à un lectorat masculin par réflexe langagier (culturel ?). (Oui, si je n’aime pas qu’on me dise comment parler, je n’ai aucun mal à modifier moi-même ma propre façon de parler ou d’agir pour coller au mieux à mon éthique. Et là je dois bien avouer que si des militantes féministes n’avaient pas parlé aussi intensément et sur une aussi longue durée de ces problèmes, sans doute que cette réflexion personnelle n’aurait jamais été déclenchée). C’est-à-dire que quand on fait bien attention à s’adresser aussi systématiquement aux femmes qu’aux hommes, on se rend compte d’à quel point ces réflexes sont ancrés en nous, et on se donne plus de moyens de ne plus faire les choses par défaut, de ne plus dire les choses comme on les disait par habitude, mais de contrôler mieux son expression.

J’ai pu écrire des choses comme :

  • les mardand·es
  • un·e marchand·e
  • des chanteurs·teuses et plus loin des chanteuses·teurs
  • des chanteurs·chanteuses et plus loin des chanteuses·chanteurs
  • des chanteurs et -teuses

J’ai même, sur les conseil de mon ami Koinkoin, tenté d’utiliser le script qui permet d’afficher la notation atomique afin qu’au lieu d’avoir l’impression d’une terminaison m. suivie d’une f. ou d’une f. suivie d’une m., les terminaisons masculine et féminine d’un mot soient superposées, avec toujours dans l’idée (et c’est là que je me vautre également dans le symbolique) d’alterner celle qui se trouverait au dessus et celle qui se trouverait en dessous de l’autre, mais sans succès. Si vous trouvez comment faire, ça m’intéresse toujours d’essayer. Toutes ces solutions, je les essaye et les alterne afin de rester dans l’inventif, le non-conforme, le pas figé. Le plus dur étant de trouver des manières pas trop désagréables à lire.

Car je vois trois problèmes majeurs à l’écriture inclusive. Le premier c’est que ça casse la musicalité d’une phrase. Car le langage est une musique. Une phrase est une mélodie, elle contient ses rythmes, ses notes et ses percussions. Changez un bout de la mélodie, elle n’est plus aussi douce à l’oreille, plus aussi cohérente, il faut en modifier un autre bout pour revenir à un résultat global satisfaisant, mais jamais elle ne sonnera aussi bien, de mon avis, que celle qui vous est venu d’un trait. Pour un blog comme celui-ci, ça n’a pas grande importance, mais pour un texte plus littéraire, ça peut être dommageable. Alors, si vous rajoutez à ça des embranchements en fin de mots plusieurs fois par phrases…

Le deuxième, c’est l’accessibilité à la lecture. La mère d’une amie, directrice de bibliothèque, et anti-écriture inclusive, m’avait fait la remarque que pour quelqu’un qui sait bien lire, ça peut passer, mais que pour les personnes souffrant de troubles d’apprentissage (dyslexie, etc.), ç’allait être un véritable calvaire si ce mode d’écriture était institutionnalisé. Vous l’avez compris, je suis pour l’institutionnalisation de que dalle, mais il est vrai qu’à un moment il faut se poser la question de comment on apprend à lire aux gens. Je ne me suis pas bien penché sur la question, je n’ai donc pas d’avis là dessus.

Enfin le troisième et principal souci d’un point de vue éthique pour moi, c’est que je n’ai pas envie de constamment rappeler qu’il y a des hommes et qu’il y a des femmes. Je veux m’adresser à tout le monde, simplement à des gens, à des personnes, je n’en ai rien à faire qu’il s’agisse d’une lectrice ou d’un lecteur. Car je pense que, si pour en arriver à une réelle égalité de traitement de tous les genres et sexes (je suis un peu paumé quant à ces deux notions, alors je mets les deux) dans une société aussi asymétrique vis-à-vis des comportements attendus des unes et des autres, ont doit évoquer les anciennes catégories pour les analyser et les transformer, mais à terme, pour consolider cette notion d’égalité totale, il faudrait pouvoir s’adresser à une catégorie neutre, l’humanité dans son ensemble. Et pour cela, eh bien oui, il nous manque un véritable neutre en français, qui ne soit pas basé sur le masculin. Ce neutre masculin, c’est principalement ce qui fait que l’adresse directe ne concerne souvent, par glissement, implicitement que des hommes comme je le disais plus haut. Pour le dire plus clairement, à force de dire lecteur, lectrice, madame, monsieur, l’un et l’une, chanteuses·teurs, j’ai l’impression de venir constamment renforcer cette idée qu’il y a deux groupes distincts. Et j’aime pas ça.

#201 – Lyonniais #027 – Y a explosion et explosion, pas confondre.

Ce matin, 10h, en allumant mon ordinateur, je découvre un tweet de la branche internationale d’un journal japonais au sujet d’une explosion à Paris. Bon. Je mate les deux-trois conneries qui ont été postées dans la nuit et je passe à reddit. On y cause d’une explosion à Paris. Bon. En fait on en parle dans tous les journaux étrangers. C’est un véritable drame, pour les journalistes je veux dire, car il ne s’agissait que d’un accident suite à une fuite de gaz. C’est en premier lieu un véritable drame pour les victimes et leurs proches, évidemment, soyez pas bêtes. Mais pas d’attaque terroriste quoi, pas un coup des hordes en jaune. Zut alors, il a dû y en avoir des rédacteurs et -trices en chef sans scrupules pour se frotter d’avance les mains et s’écrier « wouah, génial ! » à la manière d’un David Pujadas découvrant les premières images des avions s’écrasant sur le World Trade Center (vous aviez oublié ? Si si, et ça a été filmé, cherchez), sans même encore savoir de quoi il s’agissait. Eh oui, car en France pas plus qu’ailleurs on ne manque de « journalistes » davantage intéressés et -ssées par leur salaire, et donc par le tarif auquel ils et elles vont pouvoir vendre l’espace publicitaire qui ensandwiche leur actualité sensationnelle, que par l’utilité publique et la qualité des informations qu’ils et elles proposent.

Quoi ? Je suis de mauvaise foi ? Si ça s’était passé à Vesoul un jeudi soir, vous pensez qu’on en aurait parlé moins de cinq minutes après l’évènement à l’international ? Non, car personne n’aurait suspecté un évènement susceptible de faire tenir des milliers de téléspectateurs et d’internautes devant leurs écrans à consommer l’écœurante bouillie de réclames des heures durant. Et vous en entendez souvent parler, vous, des explosions suite à des fuites de gaz dans les autres pays du monde ? Non. En tout cas, on sait ce qui intéresse les journaux à pub, les journaux qui cherchent à faire exploser leur taux de profit, et c’est pas les fuites de gaz. Une heure plus tard, une fois les causes de l’accident connues, on n’en parlait déjà plus (dans la presse étrangère). À peine continuait-on de mettre à jour le nombre de morts et de blessés. Les compteurs morbides, ça attire toujours un peu de monde.

Ah la la, ils ont vraiment dû râler dans les salles de rédac, une belle explosion comme celle-ci, à Paris, un samedi matin de manifestation ! J’imagine sous quelque cervelle de journaliste s’amorcer déjà l’écriture d’un article en cas d’attentat : « Ils se sont attaqués au symbole Français par excellence, la boulangerie ! Demain, partisans de la chocolatine et du pain au chocolat marcheront pour la première fois main dans la main par toutes les rues du pays pour une manifestation hommage aux victimes. Nous ne devons pas céder à la peur, car c’est ce qu’ils cherchent, nous devons donc continuer à manger les quignons de nos baguettes encore chaudes dans la rue en rentrant des commissions, parce que c’est ça, être Français-e ! »

Bon, ben non on vous dit, c’était un accident. Dommage pour la presse à sensation, tant mieux pour le reste du monde. Car on en est là.

#200 – Lyonniais #026 – Femmes, Japon, mon article à trois ronds

« Akechi venait d’échouer. Du moins s’était-il acquitté de son rôle de protecteur envers Sanae. M. Iwase, qui lui était infiniment reconnaissant d’avoir sauvé sa fille, ne s’attarda pas à commenter ses compétences. Mais c’était une piètre consolation pour le détective, d’autant plus vexé qu’il s’était fait rouler par une femme. Et bien plus, quand il apprit de la bouche même de ses hommes que son adversaire s’était enfui après s’être travesti. »

Amis et -mies de la littérature japonaise, bonjour. Ce charmant paragraphe était un extrait du Lézard noir d’Edogawa Ranpo, publié pour la première fois en 1929 dans sa version originale, ici dans une traduction de Rose-Marie Makino-Fayolle aux éditions Philippe Picquier de 1993.

Oh, que je me dis, en lisant ça. Est-ce l’auteur ? Est-ce le personnage ? Comme je n’ai pas fini de lire, à ce stade, je réserve mon jugement. Même si quelques chapitres plus tôt, le paragraphe « A première vue, à les voir ainsi marcher ensemble, on aurait pu dire qu’elles se ressemblaient. C’est à croire que les belles femmes n’ont pas d’âge car Mme Midorikawa, qui avait dépassé trente ans, semblait aussi fraîche et innocente qu’une jeune fille », m’avait également chatouillé. Eh, c’est que je suis sur twitter, je ne pouvais pas lire ça sans penser à la polémique suscitée récemment par les propos d’un certain homme médiatique Français recueillis par un magazine classé « presse féminine ». Laquelle polémique me fit penser à moi-même au cours d’une soirée entre amies et -mis, qui, me rendant compte que mes deux amies les plus proches sortaient avec des hommes de (à la louche) dix et quinze ans de plus qu’elles et que mon père avait vingt ans de plus que ma mère, disait en plaisantant que, jaloux, moi aussi je voulais une copine plus jeune que moi ! J’étais célibataire à l’époque. Je dis donc « en plaisantant », mais quand même. Y avait un fond de quelque chose caché quelque part, dans un coin sombre. Je suis conditionné comme toutes et tous par mon milieu (au sens large) à réagir d’une certaine façon à certains stimuli, même si j’essaie chaque jour de m’affranchir un peu plus de ce conditionnement par la pensée et par les actes. Je suis d’avis qu’on ne s’en sort jamais vraiment, du petit numéro de cirque pour lequel on a été dressé·e, mais que ce n’est pas une raison pour ne pas lutter contre. Bon. Où j’en étais ? Ah oui. Edogawa Ranpo et les hommes d’autant plus vexés que c’est une femme qui les roule, et une femme belle qui bien qu’elle ait trente ans passés semble fraîche et innocente comme un jeune fille.

En lisant quelques éléments biographiques concernant l’auteur, Hirai Tarō (oui, Edogawa Ranpo c’est un pseudonyme, vous avez trouvé tout·e seul·e à quoi ça faisait référence ? Non ? Cherchez plus longtemps alors.), je découvre qu’il se lance après la seconde guerre mondiale dans une sorte de compétition avec l’un de ses amis anthropologue, Iwata Jun’ichi. En quoi consiste leur compétition ? Voir qui trouverait le plus de livres contenant des passages sur l’attirance sexuelle entre hommes. Car Iwata étudie l’homosexualité dans l’histoire du Japon. Je pense : mais quand même, si Hirai étudie l’homosexualité lui aussi, c’est qu’il doit forcément être moins plein de préjugés sur le genre que ce que ces quelques (c’est joli « que ce que ces quelques », non ? Ah bon.) phrases citées plus haut ne le laissent présager. Je cherche donc du côté des études menées par Iwata et… eh ben non, en fait. Pas forcément.

Attention, je ne dis pas que j’ai cerné le bonhomme, je dis juste que lorsque je lis que le wakashudō (la voie des jeunes hommes), qu’étudiait Iwata, consistait à encourager les relations amoureuses et sexuelles entre vieux hommes et jeunes garçons au sein de la classe des guerriers car (je cite wikipédia) « on la considérait [la pratique] comme bénéfique pour le garçon, en ce qu’elle lui enseignait vertu, honnêteté et sens du beau » et que « lui était opposé l’amour pour les femmes, accusé de féminiser les hommes », je me dis qu’on ne nage pas forcément dans la compréhension et l’acceptation des préférences de chacun·e, ni dans l’idéal d’égalité des sexes et des genres. J’ai été naïf. (Au passage, si vous voulez en savoir plus sur la wakashudō et que vous lisez l’anglais, je vous conseille de lire cet article qui est assez bref mais a le bénéfice de contenir pas mal de citations et tire un parallèle avec les pratiques pédérastiques de la Grèce antique, bien qu’il ne dise presque rien sur la place des femmes dans cette doctrine.) Si j’ajoute à ça qu’Hirai publie bon nombre de ses nouvelles dans des magazines destinés aux jeunes garçons et que ses personnages les plus connus (Kogorō —de son prénom Akechi, ouais le rageux, c’est ça— et Kobayashi) sont apparemment souvent décrits comme leaders du Shōnen tantei dan (club des (jeunes) garçons détectives), je me dis que ça ne m’étonnerait finalement pas que les femmes, il les écrive comme veulent les lire les petits garçons Japonais de son temps. C’est-à-dire insolentes et causes de frustration si elles osent se montrer supérieures à un mec dans un quelconque domaine, objets de désir mais aussi dangereuses qu’elles sont attirantes et sexuellement actives, et méchantes manipulatrices (et ce n’est ni Le Lézard Noir ni La Proie et l’ombre (du même auteur) qui me feront penser le contraire.

Bon, mais tout ça, c’est l’ancien temps, hein ? 1929 pour Hirai alias Edogawa, le deuxième millénaire pour le wakashudō. Sûr qu’aujourd’hui, les femmes sont bien mieux considérées au japon, qu’on leur attribue sans préjugé la même valeur et la même place dans la société qu’aux hommes. Hein ? Ben non patate. Tu te doutes bien. L’Université de médecine de Tokyo est accusée d’avoir diminué les notes de femmes s’étant présentées au concours d’entrée, et c’est très récent. Je traduis vite fait quelques passages de la version anglaise du journal Mainichi : « les personnes chargées de la dernière enquête ont trouvé que 66 femmes et 43 hommes avaient été recalés malgré des notes assez hautes pour être accepté aux concours sur une période de quatre ans s’achevant en 2016. Si l’on décompose année par année, 27 hommes et 15 femmes ont été recalés en 2013, 7 hommes et 17 femmes en 2014, 4 hommes et 18 femmes en 2015, et 5 hommes et 16 femmes en 2016. (…) Selon le rapport, l’ajustement des notes au concours d’entrée en fonction du sexe des candidats et d’autres critères aurait commencé en 2006 sous l’ex-président de l’université Hiroshi Ito, qui nie ces accusations. Et en ce qui concerne la raison de cette manipulation des notes, toujours selon le rapport, les personnes chargées de l’enquête ont trouvé que trois des précédents présidents, ainsi que d’autres responsables hauts placés de l’université, pensaient que le ratio des candidates femmes devait être diminué autant que possible parce que « les femmes ont tendance à démissionner de leur poste à cause du mariage et des grossesses. » » On ajoutera pour clôturer le tout : « « Les médecins doivent être forts physiquement pour supporter des horaires de travail éprouvants », rapporte à The Asahi Shimbun une étudiante paraphrasant l’un de ses instructeurs, » rapporte le Courrier International.

Est-ce qu’on parle aussi du numéro du magazine Shukan Spa! (classé « presse masculine ») sorti il y a deux semaines au Japon et qui propose un classement des universités en fonction de la facilité qu’on y a à se taper des étudiantes ? Non, vous avez raison, pas tout d’un coup. Ce serait de la gourmandise.

Allez, sur cet article bien bâclé, je me barre. Je comptais faire plus complet, mais en fait j’ai la flemme. Je rappelle aux rageux et -geuses que je ne suis ni journaliste, ni universitaire et que je traite comme je veux des sujets que je veux, et que je ne me relis pas forcément. Pouvez quand même me chier dessus dans les commentaires si ça vous fait du bien, c’est fait pour ça. Allez, à demain.

#198 – Lyonniais #024 – Rentrer au port (bis)

Aujourd’hui, je n’ai pas le temps. Pourquoi ? Parce que c’est le retour de l’être aimé. Hein ? Oui, c’est comme ça, c’est la période des retours. Hier, moi, aujourd’hui, elle. Faites donc au moins semblant d’être jouasses, s’il vous plaît. Aujourd’hui, redonc, c’est le retour de l’être aimé, et je n’ai même pas eu besoin de faire appel à un marabout. Certains ou -taines diront que c’est tricher, car le retour était prévu depuis le départ (c’est pas beau la jalousie, vous y avez laissé combien au marabout ?). À ceux-ci et celles-là je rétorquerai que non, pas forcément. J’ai déjà connu un être aimé qui malgré le fait que tout était planifié, ne fut de retour que pour me dire qu’il s’en allait. Remarquez, je ne lui en veux pas, si j’avais était elle j’aurais fait exactement la même chose. Le seul problème est que j’étais moi, et que j’étais un sale con de jeune perdu. Aujourd’hui je suis moins sale, encore un peu con, vieux, et toujours perdu. Pourquoi parler de tout ça ? Hein ? Évoquer un ex-être aimé le jour du retour de l’être aimé, on a quand même vu plus romantique. Eh bien parce que le romantisme, je me torche avec et que je débite ce qui me vient au moment où ça me vient, parce que, je vous l’ai déjà dit, je n’ai pas le temps. C’est que mon amie sera là dans à peu près une demi-heure et je n’ai pas envie de passer le soir de nos retrouvailles à me taper une note de blog. Je viens de me souvenir que le premier jour que nous avons passé ensemble avec mon amie, il y a presque huit mois, on avait décidé que je resterai chez elle pour la nuit. J’avais donc fait un aller-retour pour chez moi pour choper mon ordinateur et ainsi pouvoir rédiger ma note de blog avant de passer notre première nuit en amoureux pour me tenir à tout prix au billet quotidien. Ah, comme les choses changent vite. Aujourd’hui je ne cherche que la bonne excuse pour arrêter ce blog que je n’aurais pas dû relancer. Mais si j’arrête je me trouverai nul, plus nul que ce que je me trouve de continuer sans en avoir envie, alors bon. Bref, et pourquoi je ne m’y suis pas pris plutôt, hein ? Eh ben pardi, parce que je faisais le ménage. Comme toute personne normalement constituée qu’on laisse à elle-même pendant trois semaines. Vaisselle en retard, machines en retard, coup d’aspirateur, courses pour qu’on ait autre chose à manger que des clémentines espagnoles sans pépins et avec pesticides ce soir… Mais ! Vous me faites vraiment parler de n’importe quoi, en plus je vous dis que je n’ai pas le temps. Allez, allez, ouste, fichez-moi le camp, je reviendrai demain vous raconter que je n’ai rien à raconter.

#197 – Lyonniais #023 – Rentrer au port

Me voilà de retour de vacances. Vacances ? Comment peut-on être en vacances quand on n’est ni étudiant, ni travailleur ? Eh bien je vais vous le dire : on se coupe de tout. On reste dans sa grotte. On répond à peine aux messages, juste de quoi laisser savoir qu’on est en vie, pas assez pour laisser comprendre qu’on passe son temps en s’empiffrer de céréales au lait de soja, de tartines de purée de cacahuète et de clémentines. Pas laisser s’imaginer non plus, à raison, qu’on passe son temps à écouter des podcasts, à bouquiner ou à se goinfrer de vidéos en ligne, sans produire soi-même la moindre ligne de texte, la plus petite mélodie imaginable, le plus insignifiant kiki en bas de page. Le tout la tête dans la fumée, évidemment, car se couper de tout et de tous ne m’est pas franchement possible sans l’assistance de quelque résine pharmaceutique en vente libre à chaque bouche de métro.

Ah la la, franchement, dans quoi ils passent vos impôts… Allez, allez, rassurez-vous, ma vie est moins belle que la votre, pas de jalousie. Vous travaillez et votre vie vous paraît chiante parce que vous ne gagnez pas assez, je ne travaille pas et ma vie est une constante succession de crises existentielles. Voyez ? Rien à envier. Crises existentielles en continu donc pas de travail ou l’inverse ? Œuf, poule. Personne ne sait, même pas moi. Pourtant, vous savez que je le retourne dans tous les sens.

Je le retourne tellement sans arrêt dans tous les sens, ça et d’autres choses, que j’ai besoin de ce genre de vacances tous les mois et demi environ, pendant deux semaines. Ce n’est plus l’alcool un jour sur deux alors ça me va. Je conçois que ça puisse sembler un peu effrayant de l’extérieur, mais c’est tout à fait agréable. Les nerfs se relâchent, le sourire revient. Les soucis se font plus diffus, on relativise, on ne pense plus qu’à eux et seulement à eux. Le retour à la normale est un peu moins agréable. Il faut deux, trois jours pour se réhabituer au quotidien, reprendre contact avec l’extérieur, tout en restant de bonne humeur. Comme quand on rentre de vacances quoi. Normal, je vous l’ai dit, ce sont des vacances. C’est dans cette période de réajustement que vous me trouvez actuellement, d’ailleurs. Je suis d’assez mauvais poil, mais là au moins je sais à quoi c’est dû, et je sais que ça va passer. Enfin, on en reparle dans deux mois.

On reprend donc du service à partir d’aujourd’hui, en espérant être plus inspiré qu’il y a deux semaines (c’est pas gagné), et toujours dans l’optique d’un billet par jour (rien que d’y penser…).

Allez, bonne reprise à toutes celles et tous ceux qui comme moi rentrent de vacances.

#196 – Lyonniais #022 – Dans désespoir, il y a presque « poire ». Vous en faites ce que vous voulez. Moi, les poires, ça me fait chier.

J’aurais pu appeler cet article le Top 10 des conseils pour ne pas désespérer. Je l’ai pas fait. Bon. Désespérer à quel sujet, vous allez me demander ? Eh, vous pensez que si j’en suis à faire un Top 10 de quoi que ce soit c’est pour me casser le fion en entrer dans les nuances ? On s’amusera à remboîter le paquet de clopes dans son emballage plastique une prochaine fois (j’ai choisi ça pour remplacer « enculer les mouches » mais j’étais pas sûr que ce soit bien compréhensible alors j’essplique). Donc, Top 10 et après je pars en vacances (et voilà les vacances de merde en perspective…). Je reprendrai le blog dans une semaine à peu près. En fait, demain je pourrais encore poster si je le voulais, mais faut-il vraiment vous faire un dessin pour tout ? Je fais un Top 10. Un TOP TEN ! (Vous lisiez top « dix » depuis le début ? Pah, la ringardise ! Les autres vous avez gagné.) Ça veut dire que n’ai rien à dire, rien envie de dire. Bon, allez, plus vite on se lance…

TOP 10 DES CONSEILS POUR NE PAS DÉSESPÉRER :

  1. Ne jamais avoir eu d’espoir en quoi que ce soit en premier lieu. C’est trop tard pour vous ? Dommage, alors, c’est foutu.
  2. Puisque c’est raté pour le 1., essayons au moins de limiter la casse : n’ayez à partir de ce jour plus aucun espoir en quoi que ce soit.
  3. Ne cherchez pas à découvrir ce que sont devenues vos idoles qui avaient trente ans quand vous en aviez quinze lorsque vous aurez vous-même trente ans. Vous auriez trop de peine pour elles et pour vous.
  4. D’une manière générale, évitez de vous souvenir de ce que vous étiez ne serait-ce que dix auparavant. C’est la dépression assurée.
  5. Si par accident vous jetez tout de même un regard en arrière et vous trouvez votre vie plus belle aujourd’hui qu’il y a dix ou quinze ans, profitez-en, mais dites vous bien que vous êtes en haut des montagnes russes.
  6. Ne suivez pas les act… Oh et puis zut. Même ça j’ai pas envie de le faire.

Quoi, z’êtes déçues·s ? Alors définitivement vous n’étiez pas mûrs·es pour apprendre mes techniques secrètes anti-désespoir. La base c’est de ne jamais être déçu·e quoi qu’il arrive ! C’est pas compliqué quand même…

Bon, sur ce, j’ai pas de valises à faire mais je vais prétendre en avoir. Ciao.

Moi aussi j’aurai préféré être ivre, mais je suis désespérément sobre et ça risque de durer un moment…

#195 – Lyonniais #021 – Garçon, remettez-m’en un vers !

Avant, j’écrivais pas mal de poésie. Quand je dis avant, je veux dire quand je picolais. Ça me venait tout seul. Pas étonnant que Verlaine ait été un pochetron si ça vient tout seul à trois grammes. Il suffisait que je m’embête un peu et que j’ai deux ou trois litres de bière à portée de main, ou du whisky, ainsi qu’une feuille et un stylo, et hop ! Ou plutôt et glou-glou-gou scritch-scritch-scritch ! Entre deux allers aux chiottes je pissais des vers en m’enfilant des verres. Depuis ça ne me vient plus.

Pourquoi cet attrait pour la poésie ? Comme avec tous les domaines auxquels je touche, je n’en suis pas un grand consommateur moi-même. Tous les domaines dits artistiques, hein. Dans le domaine de l’alcool j’étais un trop grand consommateur, tout comme dans celui de la fumette. C’est bien pour ça que j’ai arrêté définitivement la bouteille et que j’ai bien freiné sur les cônes (un mois sans spliff ! Je sens que j’arrive bientôt à ma limite de sobriété volontaire en ce qui concerne la verte, mais comme j’ai pas de thunes je suis bien forcé d’attendre encore au moins quelques jours avant de me replonger dans un petit paradis-enfer artificiel). Il y a quelques auteurs que j’apprécie beaucoup, pas les plus obscurs d’ailleurs, mais ça me suffit. Je ne passe pas mon temps à aller voir tout ce qui se fait en la matière. Je ressens plutôt l’envie de faire moi-même quelque chose dans le goût de ce que j’ai apprécié.

Qui sont ces poètes ? Dans l’ordre d’apparition : Charles d’Orléans, François Villon, Agrippa d’Aubigné, Paul Verlaine et Victor Hugo. Encore que Verlaine, aujourd’hui je l’apprécie moins. Je sais, c’est pas les plus marrants. C’est pas les plus libres dans leur approche de la poésie non plus. Mais moi, dans la poésie, ce que j’aime ce n’est pas la liberté, c’est la contrainte. J’aime l’aspect puzzle. Faire entrer une narration dans un nombre de syllabes limité et respecter une certaine alternance des rimes masculines et féminines. Deux hémistiches égaux. Je trouve que c’est un bon exercice en ce qui concerne le rythme et la concision.

Bon et ben, en ce moment, rien ne me vient plus. Il y a quelques jours je me suis posé dans un bar vers 17h30 et j’ai pris un café, pour voir si l’ambiance des gens qui se la collent autour de moi réussirait à rallumer la petite flamme. Mais je n’ai pas pu aller plus loin que ça :

Cela fait bien longtemps que je n’ai pas écrit
Quelques alexandrins. J’avais pour habitude
—lorsque je picolais et menais la vie rude,
Triste, du célibat— pour étouffer les cris
Que je voulais pousser à la gueule du monde,
De composer des vers dans lesquels je passais
Mon angoisse et mes nerfs ; l’envie de tout casser ;
Le noble sentiment comme le plus immonde.

Vous voyez, je ne cherche pas à faire dans le lyrisme. Juste à raconter quelque chose, quoi que ce soit, en forçant le tout à rentrer comme je peux dans une forme imposée.

Allez, j’arrête là, il est bientôt 21h. Pour me faire pardonner de n’avoir encore pondu que du texte sans aucune photo pour aérer le tout, je vous laisse avec un petit poème que j’avais composé il y a quelque temps pour un certain magazine tellement underground que personne n’en a jamais entendu parler à part celles et ceux qui le fabriquent.

Jamais Victor Hugo n’écrivit de sonnet
Sur les aphtes buccaux ou les trous aux chaussettes.
C’est parce qu’il essayait de nous impressionner
En nous parlant de Dieux, de Patries, de Causettes.
Et pourtant lui aussi quand il mangeait des noix,
Ou parfois du cantal, ça lui collait un aphte.
Lui aussi il trouait ses socquettes de soie.
Il a bien eu du pot que personne ne cafte.
Enfin, le plus sérieux dans cette affaire-ci,
C’est qu’il ne rapportait pas tout ça de lui-même.
Qui fait des poésies pour parler de vessie
Capricieuse, ou de poils, ou de matins de flemme ?
Ou bien d’oncologie ? De bouffer du gigot ?
Ou des housses de couette ? (Ah, les housses de couette…)
C’est pas Victor Hugo ! C’est pas Victor Hugo !
Quel gros nul, celui-là. C’était une trompette.