Un peu de musique cheloue.
Je vous ai déjà parlé ici du logiciel de musique Vocaloid, un synthétiseur permettant de créer des lignes de chant, musique et paroles. C’est un logiciel de Yamaha, principalement utilisé par des musiciens japonais.
Malheureusement, en cherchant sur internet, on trouve plus de cercles de fans des personnages associés aux banques de sons du logiciel que de bonne musique. La plupart des morceaux trouvables sur le web sont soit complétement amateurs et manquent de finition, soit répondent entièrement aux codes de la j-pop commerciale, que j’ai particulièrement beaucoup de mal à apprécier dans son ensemble.
Mais, il existe quelques artistes qui se concentrent vraiment sur l’aspect musical de leur production, s’inscrivent dans le courant pop sans s’y dissoudre totalement, et viennent se frotter à cette vocaloidmania par le truchement de sons recherchés, à la limite de l’attendu et de l’expérimental, sans essayer de vous vendre des figurines, des posters ou des coussins à l’effigie d’un personnage d’animation.
C’est pour moi le cas de l’artiste Hiiragi Kirai (柊キライ), pour lequel je serais bien incapable d’écrire une biographie, même courte.
(si vous ne connaissiez pas déjà, appréciez l’intégration des commentaires directement sur la vidéo caractéristique de la plateforme niconico)
Tout en étant bien sûr influencé par la musique pop de son pays, le Japon, Hiiragi Kirai fait de bons mélanges étranges. Les paramètres des banques de son (les voix donc) sont chez lui poussées à leurs extrêmes et déformées, coupées, scratchées de diverses manières, ce qui confère un côté étrange, hors de ce monde, inquiétant, à ses musiques. On peut sentir des influences electro, rock, pop, jazz, afro-cubaines et baroques dans l’ensemble des morceaux de l’artiste. Cela peut parfois rappeler les mélanges electro-rock-jazz manouche tant à la mode par chez nous au début des années 2000.
Mais chez Hiiragi Kirai, il y également une volonté d’intégrer des dissonances, des instruments (dont la voix) qui sonnent faux, ou à peine justes et qui rendent le tout moins facilement intégrable à l’idée qu’on se fait d’un morceau mainstream. Ces dissonances voulues soulignent les thèmes sombres que l’on retrouve dans les paroles, et les voix qui déraillent complimentent très bien les émotions instables et hors de contrôle des personnages.
(dans cette chanson, par le choix de sons, la composition et l’esthétique de la vidéo l’accompagnant, on reconnait un hommage aux musiques de Yasushi Ishii, compositeur de la bande son d’Hellsing, entre autres)
Évidemment, un artiste naissant se cherche. Je ne tombe pas en admiration devant tout ce que produit Hiiragi Kirai. Ses premières musiques ne sont pas de mon goût, l’album sorti même après le premier succès (tout relatif, 1 750 000 de vues sur la plateforme niconico en deux ans) d’un de ces morceaux, ne m’a pas franchement emballé. Mais voilà, reste que de temps en temps, je vais voir ce qu’il fait et tombe sur un petit objet musical curieux pas dénué d’intérêt ni de charme.
On commence à sentir qu’il a trouvé le bon filon, la formule qui va bien. Mais est-ce un mal ? Pour l’instant, alors que je vois très bien quels éléments il me ressort à tous les morceaux, il reste assez de variations dans tout le reste pour me procurer assez de plaisir à l’écoute. Hiiragi Kirai est tout de même bien balaise niveau rupture de rythmes et sens de la mélodie.
Au cours de cet article, je vous ai partagé les trois dernières musiques sorties par Hiiragi Kirai, de la plus récente à la plus ancienne, il était donc naturel que je vous quitte sur la chanson qui a attiré mon oreille au tout début, celle qui l’a fait connaitre (tout relativement, comme je disais, il reste un compositeur tout à fait underground à ce jour), sortie en août 2019 :
Je ne sais toujours pas si j’aime ou pas cette musique. Ce que je sais, c’est que parfois, je ne peux pas m’empêcher de l’écouter une dizaine de fois d’affilée. Il y a à la fois quelque chose qui m’attire et autre chose qui me repousse dans ce morceau, et plus généralement dans ses morceaux. Et je trouve ça fort. J’aime ne pas savoir si j’aime. J’aime ne pas savoir quoi faire de cette musique. J’aime qu’elle m’attrape par des détails, et me rende accro car je n’ai pas tout à fait eu ce que j’attendais en l’écoutant et qu’il reste donc un manque à combler.
Dans tous les cas, je garde un œil sur cet artiste.